Le site de Coronmeuse
Pour l'inauguration du canal Albert – axe de transport majeur (130 km) entre le port intérieur et celui d'Anvers, maritime –, les autorités communales et l'association « Le Grand Liège » décident d'organiser, en 1939, une exposition internationale sur la thématique de l'eau. Logiquement, le site de la confluence avec le fleuve s'impose à la ville, d'autant qu'elle y dispose de vastes terrains vierges pour son développement : à l'entrée du canal, une esplanade ; en rive gauche, des équipements publics (patinoire, parc, plaine de jeux et crèche) ; en rive droite, des activités industrielles et, à terme, de nouveaux logements.
En 1937, le plan d'aménagement est confié par Georges Truffaut, échevin des Travaux publics, au chef de file de la jeune garde architecturale : Yvon Falise, âgé de 29 ans, fondateur de la revue engagée L'Équerre. « Les plans sont animés d'un excellent esprit et tout laisse supposer une réussite complète », écrit Le Corbusier après sa visite, invité par l'architecte à superviser le projet et à réaliser un pavillon, mission restée sans suite. Les grands principes de l'urbanisme fonctionnel des Congrès internationaux d'architecture moderne (Ciam) – dont le Groupe L'Équerre assure le secrétariat belge – sont ici mis en œuvre, privilégiant « de l'air, de l'espace, de la lumière, de la verdure ».
L'implantation ménage de larges espaces verts, plans d'eau et fontaines. L'architecte-paysagiste Jean Canneel-Claes est chargé de leur conception : relayant les théories rationnelles, il pérennise et développe les qualités paysagères, en maintenant sous le niveau du fleuve – dont le tirant d'eau a été relevé – les abords bucoliques du canal Liège-Maastricht déclassé (parc Astrid, darse nautique), et plante la majestueuse drève de platanes. La vision urbanistique et architecturale reste la plus aboutie des expositions internationales organisées à Liège.
Aujourd'hui morcelé, le site est destiné à être transformé en vaste écoquartier (1 000 logements), héritage des plans de Ton Venhoeven (coll. JNC) pour la candidature de l'Exposition internationale de 2017 et dont la construction est disputée entre les équipes de Norman Foster et Christian de Portzamparc (dialogue compétitif, 2014).
Sébastien Charlier
