Cité de Droixhe (ensemble)
Jalon XX

Publiée en 1962 dans le guide The New Architecture of Europe (E. Kidder Smith), répertoriée dans le Patrimoine monumental de la Belgique (1974) et identifiée dans l'Architecture contemporaine en Belgique comme « l'approche la plus ambitieuse d'un complexe d'habitations compact dans les années 1950 » (Geert Bekaert, 1993), la cité est l'un des meilleurs exemples belges d'application de l'architecture et de l'urbanisme progressistes inspirés par les principes du Mouvement moderne. 

Sa création répond à l'urgence de la mise à la disposition de logements sociaux locatifs, dont la demande, estimée à trois mille unités, explose. La Maison liégeoise organise un concours en 1950 pour concevoir le nouveau quartier qui lui serait entièrement dédié, accessible à 7 000 habitants (1 800 logements). 

L'ancien Champ des manœuvres (18 ha), vidé de ses installations de l'Exposition de 1939, est choisi pour sa position favorable : proximité du centre (3 km) et des équipements sportifs du parc Astrid, à côté de la zone industrielle nord et de ses emplois, face au magnifique plan d'eau qu'offre la Meuse, large ici de 100 m. Le Groupe d'architectes E.G.A.U. remporte le premier prix en proposant un grand ensemble (construit de 1954 à 1979), offrant plusieurs barres de logements implantées dans de vastes espaces verts, orientées selon des critères optimaux, profitant des vues généreuses sur le paysage et dotées de multiples équipements visant à l'autonomie du site. En 1958, en symbole du progrès social, Droixhe accueille « l'Exposition internationale d'urbanisme et d'habitation » dans le cadre de l'Exposition universelle de Bruxelles. 

Fragilisée par la dégradation du cadre physique (construction de l'autoroute en bord de Meuse), social (inflation de la précarité) et conceptuel (phase Croix-Rouge), la cité est affublée des travers du modernisme et son architecture en est jugée responsable. 

En 2010, sur la base d'a priori niant les potentialités initiales – dont la partie historique a pourtant été rénovée de manière probante (avenue Truffaut) – et ignorant les expériences concluantes de réhabilitation de grands ensembles à l'étranger, comme la tour Bois-le-Prêtre à Paris (Lacaton et Vassal, 2010-2011), une importante partie des logements est démolie dans un plan de dédensification (Quadra). 

Aujourd'hui, le site de la cité connaît un regain d'intérêt en raison de sa situation stratégique, traversée par la ligne de tram et accueillant le poste centre de commande et dépôt des rames. 

 

Maurizio Cohen, Thomas Moor