Entrepreneur en peintures, Pierre Skowronski avait travaillé sur quelques maisons de Charles Dumont. Séduit par sa manière de penser l'architecture, il fait appel à lui pour sa propre habitation. Dans un environnement de banlieue assez banal, les prescriptions urbanistiques vont imposer le gabarit, l'emprise au sol, la hauteur et le dépassant de corniche, la pierre en soubassement.
Au programme d'habitation classique s'ajoutent un bureau et les ateliers, que le dénivelé va permettre de loger au sous-sol, accessibles par l'arrière. L'absence de jardin est alors compensée par un travail de haute maîtrise sur les terrasses, prolongements du séjour.
Le recul imposé par l'alignement crée une zone d'entrée avec un minuscule muret, si bas que seul le sommet en bâtière semble émerger du sol, et une haute boîte aux lettres, préalables de ce que sera l'espace de la maison : une suite de lieux classiques et pourtant singuliers, des formes convenues, mais sans cesse réinterprétées.
Les impositions réglementaires deviennent un prétexte à la poésie des articulations : empattement des pierres du soubassement qui fusionnent avec les allèges des baies aux linteaux subtilement arrondis, encorbellement de la charpente sous corniche qui émerge au haut des façades, courbe du haut du mur latéral à laquelle répond celle de la terrasse qui s'y raccorde confèrent à la construction un raffinement certain.
Sans différenciation de gabarit, typologie ou matérialité des voisines, la maison Skowronski se présente pourtant comme un instant de grâce, une vision rare, la sensation furtive qu'un discours légèrement différent est possible, infiniment sensible, précis, retenu.
Alain Richard
Sources |
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Alain Richard, Charles Dumont : L'esprit d'un architecte, Bruxelles : Prisme Editions, p.50-53 ;136 |
«Maison blanche en pays noir» dans Libelle-Rosita, n° 43, octobre, 1980, p.101-104 |