Maisons et atelier Counet
Jalon XX

L'immeuble d'angle est le premier d'une série de trois édifices contigus réalisés à la demande d'un entrepreneur. À partir de 1905, Rogister délaisse l'éclectisme, mêlant styles liégeois des XVIe et XVIIe siècles, pour un langage personnel influencé par la Sécession viennoise, toutefois sans réinterpréter le plan traditionnel de l'habitation bourgeoise. Comme pour la maison Lapaille qu'il érige simultanément, cet édifice reflète particulièrement l'influence de l'Art nouveau germanique, le Jugendstil, par l'enduit blanc en façade – un usage importé à Liège dès 1901 par P. Comblen et G. Serrurier-Bovy – complété ici par les frises de carreaux en faïence bleue, ainsi que par les fenêtres rétrécies en leur partie supérieure. La tour d'angle circulaire sur plancher en béton ainsi que le soubassement en moellons évoquent, quant à eux, l'architecture traditionnelle. Les têtes sculptées, décor récurrent chez l'architecte, traduisent l'intérêt pour la symbolique maçonnique. La bouche cachée par un bandeau pourrait, en effet, signifier le secret auquel sont tenus les francs-maçons. Les trois stries gravées dans l'enduit et les trois petits carrés taillés à côté de la signature de l'architecte en constituent d'autres références. Les deux bâtisses de la rue du Parlement reprennent le même type de baies en obus tronqué que la maison  d'angle, sauf pour le dernier étage, qui  adopte des châssis circulaires, autre forme faisant partie du registre personnel de l'architecte. Construit pour abriter des habitations et un atelier de confiserie, le double bâtiment de la rue du Parlement comporte deux entrées et une élévation asymétrique. On retrouve les têtes sculptées aux consoles supportant l'oriel : ces têtes exotiques valent au bâtiment le nom de « maison des Aztèques ». Le décor sculpté est complété d'un hibou aux ailes déployées et de pilastres débordant au-delà de la corniche. Cet ensemble témoigne du soin accordé, par cet ancien collaborateur de Paul Jaspar, au dessin des différents éléments de façade (boîtes aux lettres, grilles des soupiraux, garde-corps du balcon, décors des portes, etc.).

Irene Lund, Théophile Flecheux

Sources
ART&FACT, Une histoire de l'architecture à Liège vers 1900, L'Art nouveau, Liège, Echevinat de l'Urbanisme, de l'Environnement, du Tourisme et du Développement dur., 2007
Thérèse Cortembos, Liège, Liège, Mardaga, 2004
«n° 166» dans Liège. Architectures de la ville. Cartes et répertoires. HLM fondation d'architecture et d'urbanisme et Ville de liège, 2006
Sébastien Charlier, «Victor Rogister et Clément Pirnay deux interprétations de l'enseignement de Paul Jaspar» dans Les Cahiers de l'Urbanisme, n° 72, juin, 2009, p.58-66.