La maison Sanquin constitue la première commande d'importance de l'architecte. Deux ans après avoir été diplômé à l'Académie des Beaux-Arts de Liège, Yvon Falise reçoit enfin carte blanche pour appliquer les principes qu'il défend dans L'Équerre, revue qu'il a fondée quatre ans plus tôt : rejet de l'ornementation, fonctionnalisme, économie et standardisation.
Construite en quelques mois, la bâtisse est remarquée par la critique de l'époque. En 1932, Pierre-Louis Flouquet, rédacteur en chef de la revue belge Bâtir, la choisit pour illustrer la couverture du numéro spécial consacré à l'architecture moderne à Liège. Jusque-là, les exemples d'architecture rationnelle sont rares, contrairement à Bruxelles ou en Flandre. Pour Flouquet, cette construction et le travail de Falise avec ses amis de L'Équerre représentent la naissance d'une nouvelle architecture dans la ville mosane : « Aux conditions nouvelles de vie et de pensée, les architectes de L'Équerre sont entièrement acquis. Ils croient aux puissances de la machine, à la sobriété, à l'utilité généreusement conçue. » Signalons encore qu'elle est choisie par Alberto Sartoris – figure incontournable des Congrès internationaux d'architecture moderne (Ciam) – pour illustrer son étude sur l'architecture fonctionnelle internationale.
Le plan de l'édifice ne déroge pas à celui de la maison mitoyenne traditionnelle. On retrouve les pièces en enfilade (fumoir et salle à manger) avec la cuisine en annexe ouvrant sur le jardin. Par contre, au niveau des matériaux, la maison se singularise nettement. Dans une période de crise économique et de fascination pour les produits standardisés, l'architecte délaisse les matériaux naturels au profit d'éléments industriels : béton armé pour la structure, briques de Venlo et enduit de ciment pour le parement, carrelages pour le soubassement et châssis métalliques pour les ouvertures. De même, le subtil jeu des volumes créé par la disposition hors d'équerre de la logette et de la travée de la cage d'escalier témoigne de l'intérêt que porte Falise pour les réalisations d'architectes modernistes belges majeurs, comme Victor Bourgeois ou Louis Herman de Koninck, qu'il côtoie d'ailleurs régulièrement lors des réunions de la section belge des Ciam.
Sébastien Charlier
| Sources |
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| Sébastien Charlier, L'Equerre, réédition intégrale : L'Equerre the Complete Edition, Liège, Fourre-Tout éditions, 2012 |
| Alberto Sartoris, Gli elementi dell'architettura funzionale. Sintesi panoramica dell'architettura moderna, Milan, Editore Ulrico Hoepli, 1932, p.116-119. |
| Thérèse Cortembos, Liège, Liège, Mardaga, 2004 |
| Pierre-Louis Flouquet, «L'effort des jeunes architectes liégeois. L'activité du groupe l'Equerre» dans Bâtir, n° 9, Bruxelles, 15 août, 1933, p.330-333. |