« La maison que vous vous êtes construite pour vous-même témoigne d'un effort de sincérité et de loyauté artistique que je prise hautement », écrit, en 1912, Victor Horta dans un courrier d'appui à Clément Pirnay pour l'octroi d'un permis de bâtir.
Le rez-de-chaussée abrite vestiaire, hall et secrétariat, se prolongeant sur 25 m par l'atelier d'architecture – qui comptera jusqu'à quatorze personnes – le garage et l'accès au studio de photographie en sous-sol. Les étages sont réservés au logement de l'architecte et sa famille, desservis par un escalier central dont le garde-corps en métal – comme celui des croisées finement enchevêtrées de la porte d'entrée, motif répété ensuite dans d'autres projets – partage le dessin essentiel de la Sécession viennoise, en particulier celui des menuiseries de la Caisse d'épargne à Vienne d'Otto Wagner (1906). Si la toiture plate et les fines poutres structurelles sont en béton armé, sous un appareillage de briques et pierre bleue en façade, la construction révèle une maçonnerie traditionnelle.
L'abondance de motifs sculptés est exceptionnelle dans le répertoire de l'architecte, qui en fait généralement l'impasse : compas et équerre illustrant la profession du commanditaire, sphinx ailés (loggia), chats à l'affût de lézards (terrasse), couronnes de fleurs au sommet.
« Avec cet architecte, on revient à l'idée nettement moderne un peu folle », écrit Paul Jaspar, dont Pirnay rejoint l'atelier d'architecture en 1898 avant de devenir le chef de bureau. « Citons sa maison rue Dartois : un immeuble à appartements, avec tout le confort désirable : ascenseur, chauffage central, jardins à divers étages. Il est d'ailleurs particulièrement hanté par l'idée de la maison à gradins, avec jardins suspendus. » Jaspar fait ici allusion à la transformation de 1927, exhaussant l'habitation de deux étages.
Le Groupe E.G.A.U., principal acteur de l'architecture de l'après-guerre à Liège, y installe ses bureaux dès 1948. L'immeuble est sauvé de justesse de la démolition, avec le Comptoir d'Outremer, fin des années 1980.
Sébastien Charlier et Thomas Moor
Sources |
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Sébastien Charlier, «Victor Rogister et Clément Pirnay deux interprétations de l'enseignement de Paul Jaspar» dans Les Cahiers de l'Urbanisme, n° 72, juin 2009, p.58-66. |
J.-M. Bruyère, Introduction à l'architecture moderne à Liège. Le Modern style. Clément Pirnay, Liège, Institut supérieur d'architecture Saint-Luc, 1977. |
Thérèse Cortembos, Liège, Liège, Mardaga, 2004 |