Maison Bénard

Jalon XX

Quand Auguste Bénard, l'un des principaux éditeurs artistiques de l'époque, décide de s'installer à proximité de l'imprimerie qu'il s'est fait construire (n° 13, Jorissen, 1888), son choix se porte sur Paul Jaspar. 

Cette collaboration augure d'autres commandes pour l'architecte, de la part de personnalités du monde de l'art – dont Armand Rassenfosse et Émile Berchmans qui collaborent ici, comme Auguste Donnay, à la conception et au mobilier (conservé au Grand Curtius). 

Cette maison au plan traditionnel s'élève sur quatre niveaux ; elle est flanquée d'une porte cochère donnant accès aux ateliers. La façade en briques rouges marque l'arrivée de l'Art nouveau à Liège, un tournant dans la carrière de l'architecte et dans l'histoire de l'architecture locale : elle présente une parenté évidente avec la maison de Paul Hankar à Bruxelles (1893), beau-frère de Jaspar, et considérée comme l'une des deux premières réalisations de l'Art nouveau belge avec l'hôtel Tassel de Horta. 

Étalé sur deux travées, l'immeuble comporte dans sa partie gauche, outre les fenêtres, un oriel surplombé par une terrasse ; à droite, la porte et son auvent se partagent l'espace avec plusieurs baies vitrées. Rythmée par la brique, le granit ainsi que le bois – et non le métal, comme chez Hankar –, la façade conserve une certaine rigidité, adoucie par la ligne souple des consoles supportant la logette. Aux traits rectilignes des baies, soulignés par l'encadrement en pierre, s'oppose l'arc outrepassé de la porte cochère. 

La fenêtre qui la surmonte aujourd'hui remplace deux sgraffites réalisés par Rassenfosse : ils figuraient, outre l'indication « Imprimerie », une jeune femme tenant un livre, assise sur une colline boisée proche de la ville. La façade s'ornait également de deux personnages en bas-relief (sgraffite réalisé par Oscar Berchmans). 

Julie Delbouille