Au milieu des années 1960, l'influence de l'architecte Jacques Dupuis est manifeste auprès de nombreux praticiens belges. Admiratif de celui qu'il considère comme son maître, Charles Dumont réalise une série de maisons blanches aux articulations complexes, en rupture d'angle droit.
À l'aube de sa carrière universitaire, le docteur Lambotte cherche, sur les hauteurs de Chaudfontaine, un lieu où se construire un cabanon pour le week-end, mais, séduits par le site, lui et son épouse transforment leur projet de chalet en celui d'une résidence principale. Ils contactent leur ami Jacques Gillet qui ne peut répondre efficacement à la demande, à ses contraintes et ses limites ; celui-ci leur glisse le nom de l'architecte, dont l'énergie, la fougue et l'exigence lui semblent de nature à correspondre au mieux au profil recherché. La visite de quelques réalisations achève de les convaincre : un intense contact humain s'établit. Visite du terrain, puis du domicile de l'époque : René Lambotte parle « d'une expérience formidable, du besoin de longues discussions philosophiques qui dépassaient le cadre du travail, de l'affrontement entre l'esprit éthéré de Dumont et de son propre mental scientifique ».
L'architecte exploite les affinités avec l'œuvre de Gillet pour réaffirmer qu'« un mur n'est pas nécessairement droit ». Le terrain est préservé au maximum, conservé dans son état originel. Une terrasse se découpe pour respecter un arbre, contourner les myrtillers, les bruyères et les bouleaux.
La maison s'implante en haut, face à la ligne des crêtes du site, pour profiter des vues et du sud où s'ouvrent les locaux de jour, raccordés au coin de feu cylindrique. La cuisine et la zone des parents sont à l'est. La déclivité permet de placer le quartier des enfants sur les garages, laissés un demi-niveau en contrebas. Ces dispositions assurent à la fois des possibilités de contact et d'isolement. On accède par le cœur, entre les murs de deux ailes, où la porte agit comme un filtre. Refuge, la maison s'ouvre pourtant sur la nature et encore davantage lors de chaque extension (1971, 1977).
Les habitants y voient le fait que l'architecte, en plus de chercher à connaître leurs désirs, a tenu à découvrir leur personnalité, à les rencontrer au plus profond d'eux-mêmes.
Alain Richard
Sources |
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Alain Richard, Charles Dumont : L'esprit d'un architecte, Bruxelles, Prisme Éditions, p.58-63 ; 128 |
«Habitation à Chaudfontaine» dans La Maison, n° 2, février, 1970, p.23-26 |